(1) Ecouter Alan - (2) Dessiner Alan - (3) Partager Alan
Depuis vingt ans et les premières pages publiées dans Lapin, Alan Cope est devenu un personnage de bande dessinée -- traversant tout d'abord la Deuxième Guerre Mondiale, puis revenant sur son enfance et, plus récemment avec Martha et Alan, ses premières amours. Biographe volontaire, Emmanuel Guibert est toujours prêt à évoquer ce qui fut pour lui une rencontre d'une importance rare. Entretien fleuve, en trois parties.
Extrait de la troisième partie :
Alan n’est plus là depuis 1999, c’est-à-dire bientôt vingt ans. Chaque fois que je me lance dans un livre qui lui est consacré, je l’ai avec moi, quotidiennement, devant moi, à ma charge si j’ose dire. Il faut que je l’habille, il faut que je le nourrisse, il faut que je le fasse se balader dans des univers dans lesquels il va pouvoir cheminer. Donc il faut que, si je dessine un arbre, j’imagine qu’il puisse passer derrière, grimper dessus. S’il y a une poignée de porte, il faut qu’il puisse l’actionner… Là aussi, ça a changé ma vision du dessin, parce qu’auparavant, j’aurais pu me dire, je ne sais pas : « ce dessin, je vais le faire pour montrer au monde ce dont je suis capable, et je vais essayer d’y mettre toute ma virtuosité, etc. » A partir du moment où je me dis : « ce dessin, je vais le faire parce que ça va être un précipité d’univers dans lequel mon camarade va continuer à vivre », c’est autre chose. C’est autre chose. La raison pour laquelle je dessine la rue ou la maison, c’est qu’il doit pouvoir marcher dessus. […]